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Restructuration de dette LBO : le Rôle du CFO

De l’impact d‘une restructuration de dette d’une société en LBO sur le rôle du Directeur financier.

On s’attend à une déferlante d’entreprises en difficulté du fait des conséquences économiques de la crise sanitaire du Covid-19. Et c’est un grand nombre de secteurs, par capillarité, et parce que l’ensemble des économies mondiales sont touchées, qui seront impactés à différents degrés.

Si le risque de liquidité a primé lors du confinement du printemps dernier, beaucoup d’entreprises l’ont dans un 1er temps circonscrit :

  • Réduction mécanique du BFR avec la baisse d’activité ;
  • Gestion serrée du cash
  • Utilisation des lignes de trésorerie et de crédit disponibles (emprunts obligataires pour les grands groupes) ;
  • Aides de l’État, dont le PGE (de la dette qui a financé des pertes…).

Le risque de solvabilité a ensuite pris le pas. C’est dorénavant à un double risque de liquidité et de solvabilité que nombre d’entreprises, déjà fortement endettées avant la crise, vont devoir faire face.

Dans cet environnement, des restructurations de dette sont déjà nécessaires, et le seront encore plus dans les prochains mois, notamment dans nombre de sociétés en LBO qui présentent de par leur nature, des spécificités dans ce type d’opération par rapport à des sociétés cotées ou à actionnariat familial.

Parce que beaucoup de Business Plan devront être « jetés à la poubelle », et des Business Model seront à revoir, ces restructurations pourront de moins en moins se limiter à gagner du temps en « mettant la poussière sous le tapis » avec des solutions de type « amend and extend », pour rendre supportable le service de la dette en attendant le retour à la croissance et aux cash-flow prévus pré-crise.

Elles s’accompagneront certainement beaucoup plus systématiquement qu’après la crise financière de 2008, de write-off de dette et de recomposition du capital au plus près de la Valeur d’Entreprise estimée, et de restructuration opérationnelle pour s’adapter et recréer de la valeur.

Dans un contexte simultané de, difficultés business et financières, restructurations de la dette, du capital et opérationnelle, le rôle du Directeur Financier, qui reste un élément du process, n’en est pas moins central. Or, ce type de contexte implique un changement de paradigme pour le Directeur financier (comme pour son CEO), avec une courbe d’apprentissage courte et abrupte quand on en pas vécu une 1ère expérience.

L’objet ici n’est pas tant d’entrer dans le détail d’un processus de restructuration de dette et des attributions et responsabilités du Directeur financier dans cette période. Il est d’appréhender les répercussions les plus notables pour le Directeur financier. Répercussions qui dureront plusieurs mois.

Le Directeur financier aura bien évidemment eu soin d’anticiper le contexte et ses conséquences. La mobilisation de tous les financements et aides possibles, un forecast et des simulations de sensibilité, des prévisions de cash 13 semaines roulantes, l’analyse du breakeven, la revue des dépenses et investissements à repousser, etc. Et il a bien sûr une parfaite connaissance du contrat de crédit

Au-delà de ces impacts, le directeur financier en temps de restructuration opérationnelle et du bilan est confronté à plusieurs challenges :

Besoin d’une équipe financière solide et réactive

La charge de travail du Directeur financier et d’une partie de ses équipes augmente considérablement. Au-delà du quotidien et de l’habituel, apparaissent de nouvelles demandes aux délais très courts. De nouveaux interlocuteurs également : les cellules de crise des banques, les conseils financiers et juridiques des actionnaires et prêteurs, les conseils financier et juridique de la société en tant qu’entité juridique, le conciliateur.

Gestion du temps

Au-delà du temps passé par le Directeur financier et son CEO dans de longues réunions entre les parties et leurs conseils, il est un élément essentiel de celles-ci dans les stratégies de négociation, et ce alors même que le temps presse pour la société et son management.

Compréhension des dynamiques et gestion des paradoxes

Dans un contexte où liquidité et solvabilité, Valeur d’Entreprise et « going-concern » sont en risque, et des impacts sociaux sont prévisibles, les approches des différentes parties changent et les intérêts divergent. Enjeux sur la valeur de l’investissement, sur le retour d’un apport de New Money pour les uns, recouvrabilité des prêts et les indicateurs de liquidité, solvabilité, notation crédit, Banque de France, Altman Z score, point-mort, cash-burn… pour les autres, capacité et volonté à apporter des financements ou fond propres, intérêt de l’entreprise bien sûr. Ce qui nécessitera pour le Directeur financier d’être en mesure de gérer les paradoxes et la pression au quotidien entre l’exécution du playbook des actionnaires, les prêteurs, sa responsabilité avec le CEO et l’équipe de management vis-à-vis de l’intérêt social, l’appétence ou pas pour certaines solutions dans la recomposition du capital ou de restructuration opérationnelle, etc.

La restructuration opérationnelle et le nouveau Business Plan

Le Directeur financier devra plus que jamais mettre en œuvre son « acumen » business, opérationnel et stratégique et sa capacité d’influence dans sa participation à leur élaboration. La faisabilité, le ROI et capacité à créer de la valeur, les risques d’exécution et son timing, les coûts de restructuration (sans oublier les fees de restructuration financière) et de re-positionnement, les impacts sociaux, la capacité des équipes à les mettre en œuvre… sont plus critiques que dans un contexte de croissance et de développement. S’agissant de déterminer une structure financière idéale et les besoins de financement, le plan de restructuration et le nouveau Business Plan doivent avoir une probabilité de bonne exécution et de réussite élevée, et différents scénarios anticipés, d’autant plus dans un environnement incertain comme celui de la crise actuelle. Le « wishful thinking » et les hypothèses optimistes ne sont pas de mise. Le Directeur financier sera d’ailleurs un interlocuteur privilégié de cabinets spécialisés mandatés par les différentes parties pour réaliser des IBR (Independent Business Review) et autres diligences quant à la pertinence de la restructuration opérationnelle, des hypothèses retenues et bénéfices attendus et financements nécessaires.

Enfin, le Directeur financier jouera un rôle important dans la définition, la mise en œuvre, pilotage et suivi des plans d’actions.

En résumé, le rôle du Direction financier, au-delà de critique et central dans ce processus, prend également une ampleur et une capacité d’influence toute différente, voir nouvelle, dans un contexte de restructuration de dette, capital et opérationnelle. C’est le cas également, bien évidemment, pour le CEO et l’équipe de management rapprochée.

La nature, diversité et spécificités des enjeux et intérêts, la nature même d’un processus de restructuration de dette très normé en conciliation et d’autant plus en procédure de sauvegarde souvent utilisée pour finaliser le processus, requièrent des conseils extérieurs financiers et juridiques.

Elle peut requérir également, parfois à la demande des parties prenantes, le renfort et l’accompagnement de la Direction financière et du CoDir par des opérationnels et consultants pour passer ce cap, compléter le profil des dirigeants dans ces mois de transformation financière et opérationnelle de l’entreprise.

Manuel de la Fuente
Directeur Financier (CFO) on Demand
Membre de la communauté NC Partners On Demand