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Portrait Novembre 2019

par Tiphaine Scott de Martinville

Samuel Durand, auteur d’un rapport sur le freelancing : L’exploration du travail de demain, 2019

Samuel Durand, que beaucoup appellent Sam, porte fièrement l’urgence de se réaliser. C’est sous un drapeau équatorien accroché à son mur depuis l’été, que je le découvre. «Ama la vida», dit l’hymne dudit pays. Tout Sam !… Il a traversé l’Equateur avec une bande de copains, en est revenu plus amoureux que jamais des grands espaces et de la liberté. Nous nous sommes parlé une première fois la veille, pour valider le principe du portrait. Sam est heureux de partager son parcours. L’occasion pour lui de revenir sur une année de césure, à parcourir la planète avec son acolyte Thuy-Khanh Nguyen. Les deux compères en ont ramené une étude très fouillée sur l’activité mondiale de freelancing.

Pendant un an, ils ont mené l’enquête dans toutes ces villes où les nouveaux modes de travail jaillissent comme des prés verts : Singapour, New York, Amsterdam, Londres… Autant d’arrêts sur l’image de ceux qu’on appelle généralement «les freelances». Comme Sam, la mobilité les guide. Ils ont besoin d’espace, de se sentir au cœur de la décision, fût-elle petite. Dans l’ensemble, ces indépendants ont vécu la crise des grands groupes –ceux qui disaient l’humain au cœur, et les ont pourtant lâchés d’un revers de main.

Aujourd’hui, ces freelances ont tous les âges, et même la jeunesse florissante de Sam. Si leurs motivations sont diverses, la plupart répètent leur besoin d’adaptabilité, et expérimentent au quotidien une forme de précarité : mission attrapée à la volée, réunions au café ou dans un espace de co-working, tablette et portable dans les poches d’une veste… La vie des indépendants est faite d’échange, mais ils savent la solitude. Révolution ?…

Samuel Durand

Le sourire enjôleur et les yeux malicieux, Sam transpire l’envie de transmettre le sens qu’il donne à sa vie. Il a peut-être tiré cette force des séjours qu’enfant, il faisait à l’hôpital. Un monde à part, où l’épileptique qu’il était, a appris combien le temps passe vite, et comme le bonheur, fugace, s’attrape à pleine main sitôt qu’il est là. Et puis, Sam a le goût de l’ailleurs dans les gênes. Ses parents l’ont très tôt entraîné dans leurs périples vers d’autres cultures, dont les lieux emblématiques emportent le rêve d’un nom. A l’instant avec moi, ses yeux gardent l’image de quelques tortues des Galapagos, et autres geysers d’Islande… C’est la vie, et vive la vie, qui toujours entraîne Sam vers une terre à découvrir.

Comme beaucoup d’indépendants, Sam a plusieurs casquettes. Terminant un master à Grenoble Ecole de Management (qui se dit «GEM»… comme «j’aime»), il garde les pieds à flanc de montagne et porte en parallèle la casquette de l’entrepreneur. Car le monde afflue autour de l’étude de Sam, tant elle fourmille d’idées. L’état des lieux qu’il dresse donne beaucoup à voir des enjeux auxquelles les entreprises doivent aujourd’hui faire face. Outre le besoin de mobiliser des générations un peu perdues dans des transformations frénétiques, il s’agit bien de remettre du cœur et du goût à l’ouvrage. Vaste programme, qui devrait amener ces entreprises à mieux mixer parcours, histoires, modes de travail et cultures très diverses, afin de réellement intégrer l’indépendance au quotidien.

C’est là que Sam a envie d’aider. Déjà, pour faciliter le recensement, la structuration et la formation des freelances (oui, eux non plus n’ont pas la science infuse… !). Également, pour mieux accompagner leur fonctionnement au jour le jour : financement, protection sociale, suivi juridique et comptable, démarches commerciales, accès aux locaux… Les besoins sont nombreux, car avec l’indépendance, vient la nécessité de s’occuper de tout. Sam a son idée sur la question, et porte dans sa mallette un projet d’académie qui leur serait dédié. Il devrait ainsi aider les entreprises à mieux intégrer et acculturer des indépendants qui, en retour, se placeraient et se structureraient mieux.

Comme son héros Nadal, Sam est sur tous les coups qui disent d’aller plus loin. C’est bien ce qui nous attire, alors que NC Partners On Demand souhaite renforcer l’impulsion donnée à sa communauté d’indépendants. D’autant que Sam garde l’œil sur tous ces collectifs qui, à des seuils critiques, tentent de se structurer de façon plus ou moins organique. A chaque fois, la capacité à expérimenter ensemble, à tester sans copier, amène de bonnes réponses. Sam porte bien cet esprit. Mais pas n’importe lequel : plutôt le «QLF» des rappeurs PNL qui, comme l’acronyme ne l’indique pas, dirait «Que La Famille». Est-ce à dire que, comme Sam, les indépendants se préoccupent surtout de leur communauté, de leurs entourages et amis, ceux en lesquels ils ont placé leur confiance et avec lesquels ils ont décidé d’être transparent ?… Collectif à double vitesse, qui se préoccuperait moins de ceux qui sont au loin ?… A voir.

L’esprit un peu rebelle, Sam élabore maintenant à plein régime, depuis les décalages qu’il perçoit quotidiennement, espaces à déconstruire pour mieux les dynamiser. Se sentir vulnérable, parfois sans réponse immédiate, est aussi sa ressource, confiance qu’il aimerait transmettre à ceux qui se demandent encore comment bien vivre freelance, ou avec des freelances. «Testons !» lance Sam, «puisque nous sommes connectés !». Bien dit, et rendez-vous pris pour la suite.