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La RSE : une démarche indispensable pour s’adapter et anticiper les transformations et bouleversements environnementaux et sociétaux en cours et à venir.

Transformations et bouleversements : de quoi parle-t-on ?

Nos sociétés réalisent, avec plus ou moins de difficulté, qu’elles fonctionnent depuis 200 ans sous perfusion des énergies fossiles (pétrole, charbon, gaz) et sur une double croyance (fausse), celle de l’existence de ressources illimitées et l’idée selon laquelle la Nature est faite pour être soumise à nos besoins.

Or il n’aura échappé à (presque) personne qu’en réalité, nos modèles de production, de consommation, de transport, de fonctionnement et d’organisation :

  • Dépendent, pour l’essentiel, de ressources fossiles limitées, importées très largement, et d’une biodiversité fragile.
  • Ont largement contribué à dégrader la planète et son climat.

L’accélération que nos sociétés ont connu depuis la fin de la seconde guerre mondiale n’a fait qu’accroître notre dépendance aux ressources fossiles (et désormais, aux terres rares) et nos impacts négatifs. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir tiré la sonnette d’alarme depuis plus des 50 ans ! Déjà en 1972, le rapport du Club de Rome « Halte à la croissance » alertait sur les conséquences de nos modèles de production et de consommation.

Le constat est donc le suivant : nos sociétés et nos économies ne peuvent plus continuer à fonctionner sur le même modus operandi que durant les 200 dernières années.

Se transformer et s’adapter.

Nos sociétés doivent apprendre à :

  • Minimiser leurs impacts sur le vivant, les ressources et le climat, en partant du principe que la production de déchets excessifs ne peut durer indéfiniment.
  • S’adapter aux conséquences inéluctables de leurs activités passées, présentes et encore à venir.

Si elles tardent trop, les incertitudes et les crises de multiples natures s’imposeront à elles sans qu’elles ne les aient anticipées. Si elles se saisissent de ces enjeux aujourd’hui, elles peuvent encore transformer, ce qui peut apparaître comme des contraintes, en sources d’activités et de projets futurs, originaux et inspirants !

Il est indispensable d’opérer une transformation profonde qui doit simultanément nous conduire à :

  • Être considérablement plus sobres, autrement dit, moins consommer, moins produire, moins se déplacer ou se déplacer plus lentement, moins s’enrichir ou moins maximiser son profit.
  • Décarboner l’ensemble de nos activités, ce qui revient à réduire notre dépendance aux énergies fossiles dont l’extraction risque de coûter de plus en plus cher.  
  • Repenser l’innovation, l’orienter vers la préservation de la biodiversité et la rendre moins gourmande en ressources[1].

Cette transformation se doit d’être profonde et rapide, mais aussi collective et partagée.

Pourquoi rapide et profonde ? Nous ne pouvons pas agir sur les dégâts commis jusqu’à ce jour et qui, à eux seuls, rendent la trajectoire fixée par l’Accord de Paris intenable. Pour rappel, cet Accord, signé en 2015, fixe à 2°C la hausse maximale de la température moyenne mondiale à atteindre d’ici 2100 par rapport à l’ère préindustrielle. Cette température est celle, selon les scientifiques du GIEC, au-dessus de laquelle les modèles climatiques deviennent non prédictibles. Nous avons dix ans pour inverser la vapeur. Dix ans, c’est très court. Environ 10 000 jours si on reprend le calcul de Fabrice Bonnifet, Directeur du développement durable au sein du groupe Bouygues et président du Collège des directeurs de développement durable (C3D) qui vient de faire paraître aux côtés de Céline Puff Ardichvili « L’entreprise contributive ».

Pourquoi collective et partagée ? Parce que penser la neutralité carbone à l’échelle d’une entreprise ou d’un pays ne fonctionne pas. Elle doit se penser tout au long de la chaîne de valeur pour la première, à l’échelle globale pour le second.

Mais changer ne suffira pas. Nous allons devoir aussi nous adapter pour être résilients[2]. Car même si l’Accord de Paris était respecté, le climat et la biodiversité sont déjà profondément bouleversés et ceci durablement. Ils ont commencé à bouleverser bon nombre d’activités. Les usines productrices de puces électroniques à Taiwan contraintes d’arrêter leur production en raison du manque d’accès l’eau et ne pouvant livrer leurs clients à temps constituent un exemple parmi d’autres. À l’origine de cette rupture dans la chaîne d’approvisionnement, une sécheresse locale sur une durée inhabituelle qui a conduit les autorités à privilégier les habitants aux dépens des usines dans l’accès à l’eau.

Dans ce contexte, quelle place peut prendre l’entreprise ? Qu’est-ce que la RSE ? 

L’entreprise, au même titre que les citoyens et les Etats, a son rôle à jouer. Ce rôle a d’ailleurs été inscrit dans la loi Pacte (Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises) votée en octobre 2018 et inspirée en partie des 14 grandes recommandations émises par le rapport Senard-Notat en vue d’intégrer les enjeux sociaux et environnementaux dans les problématiques des sociétés commerciales. L’article 61 de la loi stipule ainsi que la « société doit être gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité ». Les entreprises sont même invitées à se doter d’une « raison d’être » qui précise leurs finalités propres, au-delà de leur objectif lucratif.

La RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) s’inscrit pleinement dans cette approche de la loi Pacte.  En quelques mots, la RSE est une démarche :

  • Qui permet d’intégrer le développement durable dans une double logique d’atténuation des impacts et de création de valeur pour l’entreprise et ses parties prenantes.
  • Qui intègre la question de la responsabilité économique, sociale et environnementale en privilégiant l’articulation des ces trois enjeux sans les opposer.
  • Qui obéit aux principes de transparence, d’exemplarité et d’intégration des parties prenantes (ce dernier sujet étant au cœur de la RSE).
  • Qui comporte une redéfinition de ce qu’est sa réussite.

Sur ce dernier point en particulier, choisir de définir une stratégie RSE conduit à se poser plusieurs questions relatives aux postures que l’organisation fixe à son modèle d’affaires :

  • La croissance ou l’objectif de produire mieux ?
  • La maximisation de la taille ou la taille optimale ?
  • La réactivité à court terme ou la recherche de la limitation de ses impacts à moyen et long terme ?
  • La satisfaction immédiate des générations actuelles ou la prise en compte des générations futures ?

Adopter une démarche RSE revient, pour l’entreprise, à identifier des leviers de transition et à prioriser ceux qu’elle activera à court, moyen et long terme. De manière globale, la RSE constitue l’opportunité de démarrer une réflexion de fond sur sa transformation interne en vue de répondre à la complexité croissante de son écosystème, aux risques multiples sur ses marchés avec, comme volonté, d’engager ses parties prenantes internes et externes. Elle constitue une approche complémentaire à la gestion du risque, car elle permet à l’organisation de se doter d’une forte capacité d’adaptation à la complexité de son écosystème et d’anticipation des risques tout au long de sa chaîne de valeur.

Pourquoi entreprendre une stratégie RSE ?

Plusieurs raisons peuvent être invoquées par les organisations. Elles dépendent de leur histoire, de leurs valeurs, de leurs contraintes sectorielles…Plusieurs raisons essentielles peuvent être citées :

  • Chercher à limiter son impact négatif, voire mieux encore, avoir un impact positif sur son écosystème tout au long de sa chaîne de valeur : Dans ce cas l’entreprise se pose la question de son utilité pour la collectivité et place progressivement la notion de bien commun au cœur de son modèle économique. La question du sens de son activité prend de l’importance dans son modèle d’affaires.
  • Préparer les conditions de sa réussite future en réfléchissant aujourd’hui aux activités rentables de demain : C’est ce que fait par exemple le groupe Bouygues avec le soutien du cabinet Carbone 4 en imaginant une réduction majeure de son activité construction, au cœur de son business actuel au profit du développement de l’activité rénovation du bâti.
  • Répondre aux risques : Autrement dit, mieux se couvrir contre les contraintes d’accès aux matières premières par exemple, contre les impacts du réchauffement climatique ou contre le recul de la biodiversité. Certains business models, trop dépendants de la consommation d’énergies fossiles risquent de devenir obsolètes d’ici dix ans. L’entreprise en prend conscience et cherche à anticiper.
  • Répondre à la pression exercée par ses parties prenantes : Prenons le cas des investisseurs. Ils sont de plus en plus nombreux à exiger que les entreprises se préparent au risque climatique et fassent évoluer leur stratégie en conséquence. Ils prennent de plus en plus en compte les considérations environnementales, sociales et de gouvernance (critères ESG). Dans une enquête menée par BNP Paribas Securities en 2019 auprès de 347 détenteurs et gestionnaires d’actifs dans le monde[3], 52% des investisseurs étaient convaincus d’obtenir de meilleurs rendements à long terme en appliquant des critères ESG. 47 % attendaient des bénéfices en matière de marque et de réputation tandis que 37 % espéraient une diminution du risque d’investissement.

Les assureurs adoptent une posture identique à celles des investisseurs. Axa a ainsi choisi de ne plus assurer les opérations de RWE, l’énergéticien allemand, arguant que la stratégie de sortie du charbon de ce dernier n’était pas assez rapide pour se conformer aux objectifs de l’Accord de Paris. Ses activités ne sont plus compatibles avec la politique d’Axa qui vise à être totalement sorti du charbon pour ses activités d’assurance et d’investissement d’ici 2030 en Europe et dans les pays de l’OCDE (2040 pour le reste du monde)[4].

Quant aux consommateurs, ils savent de mieux en mieux faire pression sur certaines marques, que ce soit par le boycott ou la poursuite en justice. Les ONG ne sont pas en reste comme le groupe Casino a pu s’en rendre compte récemment avec son assignation en justice sur la base du devoir de vigilance. Le groupe est accusé de vendre des produits à base de viande bovine d’Amérique du Sud qui participent à la déforestation et à l’accaparement de terres des peuples autochtones.

Quels sont les freins qui limitent l’engagement des entreprises vers la RSE ?

Sans prétendre à l’exhaustivité, voici les principaux :

  • Frein financier : La stratégie RSE a un coût. Or les entreprises souffrent d’un déficit de moyens, encore plus depuis la crise sanitaire. Et les investisseurs sont encore nombreux à exiger un ROI rapide bloquant ainsi les investissements de moyen et long terme.
  • Frein concurrentiel : La stratégie RSE impose de ne plus chercher systématiquement les gains à court terme ce qui conduit logiquement à des problèmes de compétitivité vis-à-vis des concurrents et à un mécontentement de certains actionnaires.
  • Frein réglementaire : L’Etat doit ici jouer son rôle en imposant à tous les acteurs les mêmes contraintes à l’échelle nationale. Or ce n’est encore que rarement le cas. C’est d’ailleurs, d’une certaine manière, ce que dénoncent les entreprises à l’origine du Climate Act[5] début avril en expliquant que seules les entreprises de plus de 500 salariés, soit à peine 5% des entreprises françaises, ont pour obligation d’évaluer une partie de leurs émissions de gaz à effet de serre. Mais l’enjeu est aussi international pour les entreprises qui ont comme terrain de jeu des marchés à l’échelle mondiale sur lesquels les règles concurrentielles sont loin de s’appliquer uniformément à tout le monde. 
  • Frein lié au manque de connaissances sur les transformations et bouleversements décrits précédemment.
  • Frein lié à la pression du court-terme : Une stratégie RSE engage dans la durée et vise des résultats non immédiats et des impacts dont la certitude n’est pas garantie au contraire d’une approche court-termiste dont les résultats sont plus facilement mesurables.
  • Frein organisationnel : La capacité de la RSE à être impactante peut se heurter à la complexité à des niveaux jamais atteints dans certaines entreprises, en particulier dans les très grandes, où les flux sont imbriqués entre des dizaines, voire des centaines de fournisseurs dans des dizaines de pays différents à la nature juridique, à la culture et aux modes d’organisation différents.

Et les avantages de la RSE ?

Il est possible de classer les avantages sous trois angles : économiques, sociaux et environnementaux.

Sur le plan économique, adopter une stratégie RSE dans la durée de manière transparente permet de :

  • Fidéliser ses clients.
  • Se distinguer vis-à-vis de la concurrence.
  • Se positionner vers des opportunités d’avenir : On pourra ici citer par exemple la future « taxonomie » verte européenne[6], qui doit flécher les financements pour atteindre une baisse de 55 % des émissions de CO2 en 2030 et la neutralité carbone en Europe en 2050. Ce texte européen vise à conditionner la capacité d’obtenir des financements verts.
  • Réduire ses risques pour soi et ses parties prenantes.
  • Anticiper le durcissement du cadre législatif.
  • Réduire ou éviter certains coûts.

D’un point de vue social, démontrer son engagement RSE permet de :

  • Motiver ses collaborateurs/trices.
  • Attirer les talents.
  • Prévention des conflits internes comme externes.
  • Gérer le risque réputationnel vis-à-vis de ses parties prenantes.

Enfin sur le plan environnemental, elle se traduit par la volonté de :

  • Diminuer son empreinte carbone.
  • Réduire son impact sur la biodiversité, ou avoir un impact positif sur elle.
  • Devenir résilient par rapport à une baisse de l’approvisionnement en énergies fossiles.

Quelles sont les modalités de mise en œuvre de la RSE ?

Pour mettre en place sa stratégie RSE, l’entreprise peut s’appuyer sur le cadre fixé par la norme de management ISO26000 qui définit les 7 questions centrales qui devront être couvertes par sa stratégie RSE :

  • La gouvernance du business model
  • Loyauté des pratiques
  • Relation client – questions relatives au consommateur
  • Ancrage local
  • Droits de l’homme
  • Protection de la planète -environnement
  • Relations et conditions de travail 

Cette norme a été déclinée et approfondie par plusieurs organismes qui visent à certifier les engagements des entreprises. On citera notamment les labels généralistes Lucie26000, Engagés RSE proposé par l’Afnor ou la certification BCcorp ainsi que les labels thématiques comme Great Place to Work et le Kaya Index qui se focalisent sur la question du bien-être au travail ou encore les labels sectoriels tels que Ecolabel. En outre, le référentiel Global Reporting Initiative ainsi que les principes du Global Compact déclinent la norme ISO26000 sous une forme davantage reconnue à l’international.

L’entreprise pourra aussi se référer au cadre posé par les 17 Objectifs du Développement Durable (ODD) définis en 2015 par l’ONU. Les ODD peuvent constituer une trame d’analyse de ses impacts et aider à l’élaboration de la matrice de matérialité ou à la définition de son plan d’actions.

Une fois le cadre posé, les étapes par lesquelles l’organisation est amenée à passer sont les suivantes :

  • Comprendre d’où l’entreprise part à travers un diagnostic qui prend en compte les positions des parties prenantes et mesure le chemin à parcourir. Selon l’approche adoptée, l’entreprise pourra choisir de s’appuyer sur la matrice de matérialité qui permet de cartographier et de hiérarchiser les enjeux RSE d’une entreprise permet à ce stade d’évaluer son degré de maturité quant aux questions de ses impacts et de sa responsabilité. Elle pourra aussi choisir de passer par un bilan de ses émissions de gaz à effet de serre ou encore par une analyse de cycle de vie de ses produits.
  • Embarquer en co-construisant une vision, des objectifs (au regard des questions centrales de la RSE) et un plan d’actions priorisées en lien avec ses parties prenantes clés pour en déterminer la pertinence.
  • Accompagner le déploiement des actions en vérifiant qu’elles sont intégrées / comprises par ses parties prenantes. 
  • Mobiliser dans la durée en valorisant l’avancement des actions et en autonomisant les parties prenantes
  • Evaluer le chemin parcouru grâce aux indicateurs de mesures d’impact mis en place et à un reporting régulier. 
  • S’améliorer en identifiant sur la base des indicateurs, de l’évolution de son secteur, ses nouvelles priorités en termes d’impact et de responsabilité.

Deux pré-requis sont indispensables. Le premier passe par l’engagement des dirigeants et du conseil d’administration. Si l’équipe à la tête de l’organisation n’est pas convaincue de l’importance d’engager une stratégie RSE, il lui sera en effet difficile de convaincre actionnaires, investisseurs, assureurs, salariés etc. En outre, elle devra être prête à accepter la co-construction sans laquelle il lui sera quasiment impossible d’embarquer son écosystème sur le long terme.

D’autre part, quelles que soient les raisons qui conduisent l’entreprise à démarrer ou approfondir une stratégie RSE, elle doit être prête à faire évoluer son modèle d’affaires et la gouvernance associée. C’est en effet le second pré-requis. En France, les organisations qui ont l’ambition de mettre au cœur de leur business des objectifs sociétaux et environnementaux se sont réunies dans « la communauté des entreprises à mission »[7]. La démarche, exigeante, implique un engagement long et profond de l’ensemble de l’entreprise symbolisé par le changement de ses statuts.

Une fois la question de ses impacts et de son ambition posée en suivant les questions centrales de la norme ISO26000 ou le cadre des ODD, il est essentiel de se pencher sur la question des indicateurs de performance Environnementale, Sociale et de bonne Gouvernance (ESG). Aujourd’hui encore, il existe une multitude d’indicateurs sans harmonisation aucune, ce qui complexifie considérablement la comparaison des entreprises pour les investisseurs. Or la présidente de l’exécutif européen, Ursula von der Leyen compte bien remédier à ce défaut dans le cadre du Pacte Vert[8] lancé en décembre 2019.

En France, pour accompagner les entreprises, le Ministère de l’Economie a lancé le 27 mai la plateforme « Impact[9] » qui vise justement à anticiper la réglementation européenne sur la publication des données ESG. L’objectif est de proposer aux entreprises, de la TPE au grand groupe, une batterie de 49 indicateurs ESG pour les préparer à l’entrée en vigueur de la directive européenne CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) sur la publication des données extra-financières dont la transposition dans le droit français pourrait intervenir à horizon 2023. Dans moins de trois ans la plupart des entreprises de plus de 250 salariés seront ainsi soumises à des obligations fortes en matière de publication de données extra-financières. Cette directive sur le reporting ESG des entreprises vise à standardiser et contrôler les informations ESG et les risques climat publiés par celles-ci et à élargir le nombre d’entreprises soumises à ce reporting. L’objectif pour l’Union Européenne est d’améliorer l’orientation des flux de capitaux vers des activités durables.

Pour conclure

En résumé, la RSE permet de se poser la question de ses impacts sur l’environnement et la société tout en contribuant à rendre résiliente l’entreprise, sur le plan économique, et donc de lui assurer des conditions de rentabilité future raisonnable (et non plus maximale) dans un contexte à venir de plus en plus contraint et incertain. Elle favorise la capacité d’adaptation de l’organisation, une condition qui devrait devenir clé pour sa survie de demain.

Plus les entreprises s’empareront tôt du sujet RSE, plus elles seront en mesure de s’adapter. Plus elles tarderont, et plus l’obligation de se transformer s’imposera à elles. La contrainte du changement risque alors d’être beaucoup plus forte.

Choisir de s’engager dans la RSE, c’est choisir d’être sans doute moins compétitif que ses concurrents à court terme au profit de bénéfices plus importants que ces derniers dans le futur. Attirer les talents, rendre sa marque attractive auprès de ses clients, fidéliser ses collaborateurs, autant d’atouts que la RSE contribue à forger. C’est aussi faire le pari que les clients, les investisseurs, les assureurs sont prêts à donner une valeur supérieure aux entreprises qui portent un engagement qu’à celles qui font le choix contraire.

Il reste que pour être véritablement impactante, la RSE doit être soutenue au plus haut niveau de l’entreprise et être considérée au même titre que la rentabilité, comme un critère clé des prises de décisions stratégiques. Elle ne doit pas se penser « à côté » des autres métiers de l’entreprise mais bien, être intégrée au cœur de chacun d’entre eux. Chaque acteur de de l’écosystème de l’entreprise doit être sensibilisé à son importance, outillé ensuite puis valorisé lorsqu’il déploie des projets en prenant en compte leurs impacts tout au long de leur cycle de vie. La RSE pourra ainsi constituer un formidable moteur d’engagement en interne et en externe.

Pour aller loin 

Pour prendre la mesure des enjeux et accéder à des points de vue d’entreprise, rendez-vous sur les sites suivants


[1] La lecture des essais de l’ingénieur Philippe Bihouix sur ce sujet est remplie de pistes de solutions concrètes.

[2] Être capable d’avoir une activité qui prend en compte les enjeux de la transition énergétique et écologique dans la durée et de s’adapter aux perturbations.

[3] Cf : https://www.lesechos.fr/finance-marches/gestion-actifs/linvestissement-responsable-se-developpe-mais-les-donnees-posent-toujours-probleme-1007775

[4] https://www.novethic.fr/actualite/finance-durable/isr-rse/l-application-de-sa-politique-d-exclusion-du-charbon-conduit-axa-a-ne-plus-assurer-rwe-149625.html?utm_source=Abonn%C3%A9s+Novethic&utm_campaign=e82daf198d-EMAIL_CAMPAIGN_2021_03_18_03_31&utm_medium=email&utm_term=0_2876b612e6-e82daf198d-171544338

[5] https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/climate-act-plus-de-100-entreprises-en-hypercroissance-s-engagent-pour-le-climat-882827.html

[6] https://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/articles/taxonomie-europeenne-des-investissements-verts-encore-rate-92425/

[7] https://www.entreprisesamission.com/

[8] https://www.lesechos.fr/monde/europe/climat-les-europeens-a-lheure-de-lengagement-1155723

[9] https://www.impact.gouv.fr/

Transformations et bouleversements : de quoi parle-t-on ?

Nos sociétés réalisent, avec plus ou moins de difficulté, qu’elles fonctionnent depuis 200 ans sous perfusion des énergies fossiles (pétrole, charbon, gaz) et sur une double croyance (fausse), celle de l’existence de ressources illimitées et l’idée selon laquelle la Nature est faite pour être soumise à nos besoins.

Or il n’aura échappé à (presque) personne qu’en réalité, nos modèles de production, de consommation, de transport, de fonctionnement et d’organisation :

  • Dépendent, pour l’essentiel, de ressources fossiles limitées, importées très largement, et d’une biodiversité fragile.
  • Ont largement contribué à dégrader la planète et son climat.

L’accélération que nos sociétés ont connu depuis la fin de la seconde guerre mondiale n’a fait qu’accroître notre dépendance aux ressources fossiles (et désormais, aux terres rares) et nos impacts négatifs. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir tiré la sonnette d’alarme depuis plus des 50 ans ! Déjà en 1972, le rapport du Club de Rome « Halte à la croissance » alertait sur les conséquences de nos modèles de production et de consommation.

Le constat est donc le suivant : nos sociétés et nos économies ne peuvent plus continuer à fonctionner sur le même modus operandi que durant les 200 dernières années.

Se transformer et s’adapter.

Nos sociétés doivent apprendre à :

  • Minimiser leurs impacts sur le vivant, les ressources et le climat, en partant du principe que la production de déchets excessifs ne peut durer indéfiniment.
  • S’adapter aux conséquences inéluctables de leurs activités passées, présentes et encore à venir.

Si elles tardent trop, les incertitudes et les crises de multiples natures s’imposeront à elles sans qu’elles ne les aient anticipées. Si elles se saisissent de ces enjeux aujourd’hui, elles peuvent encore transformer, ce qui peut apparaître comme des contraintes, en sources d’activités et de projets futurs, originaux et inspirants !

Il est indispensable d’opérer une transformation profonde qui doit simultanément nous conduire à :

  • Être considérablement plus sobres, autrement dit, moins consommer, moins produire, moins se déplacer ou se déplacer plus lentement, moins s’enrichir ou moins maximiser son profit.
  • Décarboner l’ensemble de nos activités, ce qui revient à réduire notre dépendance aux énergies fossiles dont l’extraction risque de coûter de plus en plus cher.  
  • Repenser l’innovation, l’orienter vers la préservation de la biodiversité et la rendre moins gourmande en ressources[1].

Cette transformation se doit d’être profonde et rapide, mais aussi collective et partagée.

Pourquoi rapide et profonde ? Nous ne pouvons pas agir sur les dégâts commis jusqu’à ce jour et qui, à eux seuls, rendent la trajectoire fixée par l’Accord de Paris intenable. Pour rappel, cet Accord, signé en 2015, fixe à 2°C la hausse maximale de la température moyenne mondiale à atteindre d’ici 2100 par rapport à l’ère préindustrielle. Cette température est celle, selon les scientifiques du GIEC, au-dessus de laquelle les modèles climatiques deviennent non prédictibles. Nous avons dix ans pour inverser la vapeur. Dix ans, c’est très court. Environ 10 000 jours si on reprend le calcul de Fabrice Bonnifet, Directeur du développement durable au sein du groupe Bouygues et président du Collège des directeurs de développement durable (C3D) qui vient de faire paraître aux côtés de Céline Puff Ardichvili « L’entreprise contributive ».

Pourquoi collective et partagée ? Parce que penser la neutralité carbone à l’échelle d’une entreprise ou d’un pays ne fonctionne pas. Elle doit se penser tout au long de la chaîne de valeur pour la première, à l’échelle globale pour le second.

Mais changer ne suffira pas. Nous allons devoir aussi nous adapter pour être résilients[2]. Car même si l’Accord de Paris était respecté, le climat et la biodiversité sont déjà profondément bouleversés et ceci durablement. Ils ont commencé à bouleverser bon nombre d’activités. Les usines productrices de puces électroniques à Taiwan contraintes d’arrêter leur production en raison du manque d’accès l’eau et ne pouvant livrer leurs clients à temps constitue un exemple parmi d’autres. A l’origine de cette rupture dans la chaîne d’approvisionnement, une sécheresse locale sur une durée inhabituelle qui a conduit les autorités à privilégier les habitants aux dépens des usines dans l’accès à l’eau.

Dans ce contexte, quelle place peut prendre l’entreprise ? Qu’est-ce que la RSE ? 

L’entreprise, au même titre que les citoyens et les Etats, a son rôle à jouer. Ce rôle a d’ailleurs été inscrit dans la loi Pacte (Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises) votée en octobre 2018 et inspirée en partie des 14 grandes recommandations émises par le rapport Senard-Notat en vue d’intégrer les enjeux sociaux et environnementaux dans les problématiques des sociétés commerciales. L’article 61 de la loi stipule ainsi que la « société doit être gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité ». Les entreprises sont même invitées à se doter d’une « raison d’être » qui précise leurs finalités propres, au-delà de leur objectif lucratif.

La RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) s’inscrit pleinement dans cette approche de la loi Pacte.  En quelques mots, la RSE est une démarche :

  • Qui permet d’intégrer le développement durable dans une double logique d’atténuation des impacts et de création de valeur pour l’entreprise et ses parties prenantes.
  • Qui intègre la question de la responsabilité économique, sociale et environnementale en privilégiant l’articulation des ces trois enjeux sans les opposer.
  • Qui obéit aux principes de transparence, d’exemplarité et d’intégration des parties prenantes (ce dernier sujet étant au cœur de la RSE).
  • Qui comporte une redéfinition de ce qu’est sa réussite.

Sur ce dernier point en particulier, choisir de définir une stratégie RSE conduit à se poser plusieurs questions relatives aux postures que l’organisation fixe à son modèle d’affaires :

  • La croissance ou l’objectif de produire mieux ?
  • La maximisation de la taille ou la taille optimale ?
  • La réactivité à court terme ou la recherche de la limitation de ses impacts à moyen et long terme ?
  • La satisfaction immédiate des générations actuelles ou la prise en compte des générations futures ?

Adopter une démarche RSE revient, pour l’entreprise, à identifier des leviers de transition et à prioriser ceux qu’elle activera à court, moyen et long terme. De manière globale, la RSE constitue l’opportunité de démarrer une réflexion de fond sur sa transformation interne en vue de répondre à la complexité croissante de son écosystème, aux risques multiples sur ses marchés avec, comme volonté, d’engager ses parties prenantes internes et externes. Elle constitue une approche complémentaire à la gestion du risque car elle permet à l’organisation de se doter d’une forte capacité d’adaptation à la complexité de son écosystème et d’anticipation des risques tout au long de sa chaîne de valeur.

Pourquoi entreprendre une stratégie RSE ?

Plusieurs raisons peuvent être invoquées par les organisations. Elles dépendent de leur histoire, de leurs valeurs, de leurs contraintes sectorielles…Plusieurs raisons essentielles peuvent être citées :

  • Chercher à limiter son impact négatif, voire mieux encore, avoir un impact positif sur son écosystème tout au long de sa chaîne de valeur : Dans ce cas l’entreprise se pose la question de son utilité pour la collectivité et place progressivement la notion de bien commun au cœur de son modèle économique. La question du sens de son activité prend de l’importance dans son modèle d’affaires.
  • Préparer les conditions de sa réussite future en réfléchissant aujourd’hui aux activités rentables de demain : C’est ce que fait par exemple le groupe Bouygues avec le soutien du cabinet Carbone 4 en imaginant une réduction majeure de son activité construction, au cœur de son business actuel au profit du développement de l’activité rénovation du bâti.
  • Répondre aux risques : Autrement dit, mieux se couvrir contre les contraintes d’accès aux matières premières par exemple, contre les impacts du réchauffement climatique ou contre le recul de la biodiversité. Certains business models, trop dépendants de la consommation d’énergies fossiles risquent de devenir obsolètes d’ici dix ans. L’entreprise en prend conscience et cherche à anticiper.
  • Répondre à la pression exercée par ses parties prenantes : Prenons le cas des investisseurs. Ils sont de plus en plus nombreux à exiger que les entreprises se préparent au risque climatique et fassent évoluer leur stratégie en conséquence. Ils prennent de plus en plus en compte les considérations environnementales, sociales et de gouvernance (critères ESG). Dans une enquête menée par BNP Paribas Securities en 2019 auprès de 347 détenteurs et gestionnaires d’actifs dans le monde[3], 52% des investisseurs étaient convaincus d’obtenir de meilleurs rendements à long terme en appliquant des critères ESG. 47 % attendaient des bénéfices en matière de marque et de réputation tandis que 37 % espéraient une diminution du risque d’investissement.

Les assureurs adoptent une posture identique à celles des investisseurs. Axa a ainsi choisi de ne plus assurer les opérations de RWE, l’énergéticien allemand, arguant que la stratégie de sortie du charbon de ce dernier n’était pas assez rapide pour se conformer aux objectifs de l’Accord de Paris. Ses activités ne sont plus compatibles avec la politique d’Axa qui vise à être totalement sorti du charbon pour ses activités d’assurance et d’investissement d’ici 2030 en Europe et dans les pays de l’OCDE (2040 pour le reste du monde)[4].

Quant aux consommateurs, ils savent de mieux en mieux faire pression sur certaines marques, que ce soit par le boycott ou la poursuite en justice. Les ONG ne sont pas en reste comme le groupe Casino a pu s’en rendre compte récemment avec son assignation en justice sur la base du devoir de vigilance. Le groupe est accusé de vendre des produits à base de viande bovine d’Amérique du Sud qui participent à la déforestation et à l’accaparement de terres des peuples autochtones.

Quels sont les freins qui limitent l’engagement des entreprises vers la RSE ?

Sans prétendre à l’exhaustivité, voici les principaux :

  • Frein financier : La stratégie RSE a un coût. Or les entreprises souffrent d’un déficit de moyens, encore plus depuis la crise sanitaire. Et les investisseurs sont encore nombreux à exiger un ROI rapide bloquant ainsi les investissements de moyen et long terme.
  • Frein concurrentiel : La stratégie RSE impose de ne plus chercher systématiquement les gains à court terme ce qui conduit logiquement à des problèmes de compétitivité vis-à-vis des concurrents et à un mécontentement de certains actionnaires.
  • Frein réglementaire : L’Etat doit ici jouer son rôle en imposant à tous les acteurs les mêmes contraintes à l’échelle nationale. Or ce n’est encore que rarement le cas. C’est d’ailleurs, d’une certaine manière, ce que dénoncent les entreprises à l’origine du Climate Act[5] début avril en expliquant que seules les entreprises de plus de 500 salariés, soit à peine 5% des entreprises françaises, ont pour obligation d’évaluer une partie de leurs émissions de gaz à effet de serre. Mais l’enjeu est aussi international pour les entreprises qui ont comme terrain de jeu des marchés à l’échelle mondiale sur lesquels les règles concurrentielles sont loin de s’appliquer uniformément à tout le monde. 
  • Frein lié au manque de connaissances sur les transformations et bouleversements décrits précédemment.
  • Frein lié à la pression du court-terme : Une stratégie RSE engage dans la durée et vise des résultats non immédiats et des impacts dont la certitude n’est pas garantie au contraire d’une approche court-termiste dont les résultats sont plus facilement mesurables.
  • Frein organisationnel : La capacité de la RSE à être impactante peut se heurter à la complexité à des niveaux jamais atteints dans certaines entreprises, en particulier dans les très grandes, où les flux sont imbriqués entre des dizaines, voire des centaines de fournisseurs dans des dizaines de pays différents à la nature juridique, à la culture et aux modes d’organisation différents.

Et les avantages de la RSE ?

Il est possible de classer les avantages sous trois angles : économiques, sociaux et environnementaux.

Sur le plan économique, adopter une stratégie RSE dans la durée de manière transparente permet de :

  • Fidéliser ses clients.
  • Se distinguer vis-à-vis de la concurrence.
  • Se positionner vers des opportunités d’avenir : On pourra ici citer par exemple la future « taxonomie » verte européenne[6], qui doit flécher les financements pour atteindre une baisse de 55 % des émissions de CO2 en 2030 et la neutralité carbone en Europe en 2050. Ce texte européen vise à conditionner la capacité d’obtenir des financements verts.
  • Réduire ses risques pour soi et ses parties prenantes.
  • Anticiper le durcissement du cadre législatif.
  • Réduire ou éviter certains coûts.

D’un point de vue social, démontrer son engagement RSE permet de :

  • Motiver ses collaborateurs/trices.
  • Attirer les talents.
  • Prévention des conflits internes comme externes.
  • Gérer le risque réputationnel vis-à-vis de ses parties prenantes.

Enfin sur le plan environnemental, elle se traduit par la volonté de :

  • Diminuer son empreinte carbone.
  • Réduire son impact sur la biodiversité, ou avoir un impact positif sur elle.
  • Devenir résilient par rapport à une baisse de l’approvisionnement en énergies fossiles.

Quelles sont les modalités de mise en œuvre de la RSE ?

Pour mettre en place sa stratégie RSE, l’entreprise peut s’appuyer sur le cadre fixé par la norme de management ISO26000 qui définit les 7 questions centrales qui devront être couvertes par sa stratégie RSE :

  • La gouvernance du business model
  • Loyauté des pratiques
  • Relation client – questions relatives au consommateur
  • Ancrage local
  • Droits de l’homme
  • Protection de la planète -environnement
  • Relations et conditions de travail 

Cette norme a été déclinée et approfondie par plusieurs organismes qui visent à certifier les engagements des entreprises. On citera notamment les labels généralistes Lucie26000, Engagés RSE proposé par l’Afnor ou la certification BCcorp ainsi que les labels thématiques comme Great Place to Work et le Kaya Index qui se focalisent sur la question du bien-être au travail ou encore les labels sectoriels tels que Ecolabel. En outre, le référentiel Global Reporting Initiative ainsi que les principes du Global Compact déclinent la norme ISO26000 sous une forme davantage reconnue à l’international.

L’entreprise pourra aussi se référer au cadre posé par les 17 Objectifs du Développement Durable (ODD) définis en 2015 par l’ONU. Les ODD peuvent constituer une trame d’analyse de ses impacts et aider à l’élaboration de la matrice de matérialité ou à la définition de son plan d’actions.

Une fois le cadre posé, les étapes par lesquelles l’organisation est amenée à passer sont les suivantes :

  • Comprendre d’où l’entreprise part à travers un diagnostic qui prend en compte les positions des parties prenantes et mesure le chemin à parcourir. Selon l’approche adoptée, l’entreprise pourra choisir de s’appuyer sur la matrice de matérialité qui permet de cartographier et de hiérarchiser les enjeux RSE d’une entreprise permet à ce stade d’évaluer son degré de maturité quant aux questions de ses impacts et de sa responsabilité. Elle pourra aussi choisir de passer par un bilan de ses émissions de gaz à effet de serre ou encore par une analyse de cycle de vie de ses produits.
  • Embarquer en co-construisant une vision, des objectifs (au regard des questions centrales de la RSE) et un plan d’actions priorisées en lien avec ses parties prenantes clés pour en déterminer la pertinence.
  • Accompagner le déploiement des actions en vérifiant qu’elles sont intégrées / comprises par ses parties prenantes. 
  • Mobiliser dans la durée en valorisant l’avancement des actions et en autonomisant les parties prenantes
  • Evaluer le chemin parcouru grâce aux indicateurs de mesures d’impact mis en place et à un reporting régulier. 
  • S’améliorer en identifiant sur la base des indicateurs, de l’évolution de son secteur, ses nouvelles priorités en termes d’impact et de responsabilité.

Deux pré-requis sont indispensables. Le premier passe par l’engagement des dirigeants et du conseil d’administration. Si l’équipe à la tête de l’organisation n’est pas convaincue de l’importance d’engager une stratégie RSE, il lui sera en effet difficile de convaincre actionnaires, investisseurs, assureurs, salariés etc. En outre, elle devra être prête à accepter la co-construction sans laquelle il lui sera quasiment impossible d’embarquer son écosystème sur le long terme.

D’autre part, quelles que soient les raisons qui conduisent l’entreprise à démarrer ou approfondir une stratégie RSE, elle doit être prête à faire évoluer son modèle d’affaires et la gouvernance associée. C’est en effet le second pré-requis. En France, les organisations qui ont l’ambition de mettre au cœur de leur business des objectifs sociétaux et environnementaux se sont réunies dans « la communauté des entreprises à mission »[7]. La démarche, exigeante, implique un engagement long et profond de l’ensemble de l’entreprise symbolisé par le changement de ses statuts.

Une fois la question de ses impacts et de son ambition posée en suivant les questions centrales de la norme ISO26000 ou le cadre des ODD, il est essentiel de se pencher sur la question des indicateurs de performance Environnementale, Sociale et de bonne Gouvernance (ESG). Aujourd’hui encore, il existe une multitude d’indicateurs sans harmonisation aucune, ce qui complexifie considérablement la comparaison des entreprises pour les investisseurs. Or la présidente de l’exécutif européen, Ursula von der Leyen compte bien remédier à ce défaut dans le cadre du Pacte Vert[8] lancé en décembre 2019.

En France, pour accompagner les entreprises, le Ministère de l’Economie a lancé le 27 mai la plateforme « Impact[9] » qui vise justement à anticiper la réglementation européenne sur la publication des données ESG. L’objectif est de proposer aux entreprises, de la TPE au grand groupe, une batterie de 49 indicateurs ESG pour les préparer à l’entrée en vigueur de la directive européenne CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) sur la publication des données extra-financières dont la transposition dans le droit français pourrait intervenir à horizon 2023. Dans moins de trois ans la plupart des entreprises de plus de 250 salariés seront ainsi soumises à des obligations fortes en matière de publication de données extra-financières. Cette directive sur le reporting ESG des entreprises vise à standardiser et contrôler les informations ESG et les risques climat publiés par celles-ci et à élargir le nombre d’entreprises soumises à ce reporting. L’objectif pour l’Union Européenne est d’améliorer l’orientation des flux de capitaux vers des activités durables.

Pour conclure

En résumé, la RSE permet de se poser la question de ses impacts sur l’environnement et la société tout en contribuant à rendre résiliente l’entreprise, sur le plan économique, et donc de lui assurer des conditions de rentabilité future raisonnable (et non plus maximale) dans un contexte à venir de plus en plus contraint et incertain. Elle favorise la capacité d’adaptation de l’organisation, une condition qui devrait devenir clé pour sa survie de demain.

Plus les entreprises s’empareront tôt du sujet RSE, plus elles seront en mesure de s’adapter. Plus elles tarderont, et plus l’obligation de se transformer s’imposera à elles. La contrainte du changement risque alors d’être beaucoup plus forte.

Choisir de s’engager dans la RSE, c’est choisir d’être sans doute moins compétitif que ses concurrents à court terme au profit de bénéfices plus importants que ces derniers dans le futur. Attirer les talents, rendre sa marque attractive auprès de ses clients, fidéliser ses collaborateurs, autant d’atouts que la RSE contribue à forger. C’est aussi faire le pari que les clients, les investisseurs, les assureurs sont prêts à donner une valeur supérieure aux entreprises qui portent un engagement qu’à celles qui font le choix contraire.

Il reste que pour être véritablement impactante, la RSE doit être soutenue au plus haut niveau de l’entreprise et être considérée au même titre que la rentabilité, comme un critère clé des prises de décisions stratégiques. Elle ne doit pas se penser « à côté » des autres métiers de l’entreprise mais bien, être intégrée au cœur de chacun d’entre eux. Chaque acteur de de l’écosystème de l’entreprise doit être sensibilisé à son importance, outillé ensuite puis valorisé lorsqu’il déploie des projets en prenant en compte leurs impacts tout au long de leur cycle de vie. La RSE pourra ainsi constituer un formidable moteur d’engagement en interne et en externe.

Pour aller loin 

Pour prendre la mesure des enjeux et accéder à des points de vue d’entreprise, rendez-vous sur les sites suivants


[1] La lecture des essais de l’ingénieur Philippe Bihouix sur ce sujet est remplie de pistes de solutions concrètes.

[2] Être capable d’avoir une activité qui prend en compte les enjeux de la transition énergétique et écologique dans la durée et de s’adapter aux perturbations.

[3] Cf : https://www.lesechos.fr/finance-marches/gestion-actifs/linvestissement-responsable-se-developpe-mais-les-donnees-posent-toujours-probleme-1007775

[4] https://www.novethic.fr/actualite/finance-durable/isr-rse/l-application-de-sa-politique-d-exclusion-du-charbon-conduit-axa-a-ne-plus-assurer-rwe-149625.html?utm_source=Abonn%C3%A9s+Novethic&utm_campaign=e82daf198d-EMAIL_CAMPAIGN_2021_03_18_03_31&utm_medium=email&utm_term=0_2876b612e6-e82daf198d-171544338

[5] https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/climate-act-plus-de-100-entreprises-en-hypercroissance-s-engagent-pour-le-climat-882827.html

[6] https://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/articles/taxonomie-europeenne-des-investissements-verts-encore-rate-92425/

[7] https://www.entreprisesamission.com/

[8] https://www.lesechos.fr/monde/europe/climat-les-europeens-a-lheure-de-lengagement-1155723

[9] https://www.impact.gouv.fr/

Ce point de vue a été rédigé par Laetitia Bougier, Accompagnatrice – RSE, développement durable, bilan carbone et membre de la communauté BlueBirds.