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Serge Bonnel, ancien PDG de Continental France, met à profit son nouveau statut de consultant pour faire bénéficier aux PME et jeunes structures de sa vaste expérience. Avec vérité et sans jamais trembler.
Comment distinguer un consultant d’un autre ? Qu’est-ce qui les différencie ? Qu’est-ce qui les singularise ? Dans un océan de gens tous plus brillants, impliqués et sérieux que les autres, comment faire son choix ? Finalement, tout se joue peut-être à une attitude, un regard, une remarque bien placée ou à une personnalité, une façon de fonctionner. Serge Bonnel est de ceux-là. Le regard est perçant et amusé, le verbe ciselé et affable, la pensée limpide.
Il faut dire qu’à 60 ans celui qui en fait à peine 45 n’a plus vraiment de temps à perdre avec les courbettes et les circonvolutions : “Je suis quelqu’un d’exigeant et de direct. Je ne suis pas facile, mais je suis quelqu’un d’honnête et de respectueux.” Du franc-parler et de l’honnêteté intellectuelle.Des qualités finalement indispensables quand on travaille dans le management de transition. Enfin, en théorie. Car combien de consultants par souci d’obtenir une nouvelle mission n’hésitent pas à édulcorer leurs propos ? Une façon de faire bien loin des pratiques de Serge Bonnel. “Je dis les choses comme elles sont même si ça ne fait pas plaisir.”
En même temps, quand on vient d’un milieu modeste, qu’on n’a pas eu la chance d’avoir un mentor et qu’on est bombardé PDG de la filiale France du groupe Continental à seulement 45 ans, peut-il en être autrement ? Il a bien fallu se distinguer des autres. Sûrement en étant un peu plus honnête que les autres. Plus ambitieux aussi. Serge Bonnel ne doit sa carrière qu’à sa force de caractère, qui irradie par tous les pores de sa peau, mais aussi de travail. “J’ai grandi dans un appartement à côté de l’autoroute, près de Bordeaux, et j’avais faim de réussite. Je ne fais pas partie de ces esprits doués pour tout. J’ai dû m’accrocher et travailler dur.” Il a aussi toujours cherché à faire mieux.
Prendre la mer et le vent
Son diplôme d’ingénieur Arts et Métiers et son MBA de l’INSAED en poche, il enchaîne les postes à un rythme moyen de trois ans. “Les situations stables m’ont toujours embêté. Au bout d’un an, quand j’avais compris la mécanique du poste, je m’emmerdais. La satisfaction pour moi, ce n’est pas d’être en maîtrise. Je préfère prendre la mer et un coup de vent, que de rester à terre et rêver de voyage.” Alors il rebondissait ailleurs. Comme directeur du marketing, puis des ventes chez Aliaxis. Comme directeur général pour les fermetures Groom. Comme responsable de BU chez Siemens.
Jusqu’à se hisser à la plus haute marche en 2008 chez Continental France : un poste de direction générale. Un poste en or, dans un contexte où l’entreprise se porte bien et où Serge profite de l’expérience de son prédécesseur pendant six mois, avant son départ en retraite. Une période de tuilage aussi rare que précieuse. “Quand on m’a donné les clés du camion, je savais exactement ce que je voulais faire et j’ai pu le mettre en œuvre. On a enchaîné les années record pendant six ans.” Sans doute l’une des plus grandes fiertés professionnelles de Serge Bonnel car les résultats sont là.
Mais voilà, dans le monde étant tel que nous le connaissons, après les périodes d’abondance viennent celles de disette. Face à une concurrence internationale majeure, la maison mère de Continental décide de fermer son usine de fabrication de pneus à Clairoix. Serge doit mener à bien le plan social des quelque 1200 salariés. Un événement difficile : “Dans ce contexte, contrairement à ce qu’on dit, il n’y a pas de bonnes solutions, que des mauvaises. […] Je me méfie de l’affect. Se laisser guider par ses émotions dans le business n’est pas une bonne idée de mon point de vue. Il faut de l’instinct pour percevoir les choses, mais il faut aussi le confronter à des données pour structurer sa pensée et prendre des décisions. De la même manière, on ne peut pas diriger une boîte avec un tableau Excel.”
Il reste dix ans à la tête de la filiale française, en la rentabilisant et en développant par acquisitions toute la filiale de distribution de pneumatiques. Jusqu’à un changement de cap du groupe. Serge n’a plus la même latitude et on lui fait comprendre qu’il doit partir. “Je l’avais un peu cherché. Je ne suis pas du genre à aller dans le sens du vent. Je reste quoi qu’il arrive fidèle à mes convictions.” Et tant pis, si ça ne plaît pas à tout le monde. “Par contre, s’amuse-t-il, quand je commets une maladresse, je suis vexé comme un poux et je peux ressasser la chose pendant des semaines. Non pas que je sois perfectionniste mais je veux réussir ce que j’entreprends.”
Regarder droit devant
De retour sur le marché du travail à 56 ans, Serge Bonnel s’interroge : que faire ? Les grands groupes favorisent la plupart du temps la promotion interne pour les directions générales, les PME sont souvent effrayées par un profil aussi capé que celui de Serge. Il pense au coaching à un moment, mais non : “Ma capacité pédagogique est assez nulle.” Puis, le conseil s’impose comme une évidence, mais pas en cabinet. Il ne veut pas se contenter de faire des recommandations, il veut agir, se sentir utile. “Faire l’analyse intellectuelle d’une situation est intéressant, mais pour moi le vrai challenge, c’est la mise en œuvre d’un projet de transformation.” C’est décidé, il sera indépendant. Il est vrai que le statut lui va comme un gant : on le consulte pour son expérience vaste et plurale, on écoute ses conseils, on apprécie ses idées et sa vision. “Cela me permet à la fois de rester fidèle à moi-même, d’être encore surpris professionnellement en découvrant de nouvelles manières de fonctionner et en même temps, de profiter de mon temps personnel pour être avec ma famille et naviguer.” Dit comme ça, c’est peut-être la clé du bonheur.
Déborah Coeffier