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Le manager de transition Philippe Tura est un globe-trotteur de l’industrie et des achats, sa spécialité depuis toujours. Il a travaillé dans l’équipement automobile, les télécoms, la cosmétique, ou encore l’équipement industriel, dans des grands groupes et des PME jusqu’à développer une véritable expertise et une faculté d’adaptation peu commune.
La voix de Philippe Tura évoque le soleil. Après une vie passée aux quatre coins de la France et surtout en région parisienne, l’homme de 57 ans n’a jamais réussi à se départir de son discret accent de Perpignan. Avec ses lunettes carrées rouges et sa bibliothèque débordante en arrière-plan, on pourrait croire le manager de transition professeur. En même temps, à ses heures perdues, Philippe Tura enseigne aussi la stratégie achat, la négociation et les risques internationaux en écoles de commerce. L’habit fait parfois le moine.
Il faut dire qu’en 35 ans de carrière, le manager de transition a développé une expertise peu commune. L’homme au regard déterminé sait ménager ses silences : “Tout s’achète, je suis bien placé pour le savoir”, souligne-t-il à moitié amusé. Pourtant ses premières amours l’avaient conduit à suivre des études de physique théorique à une époque où la mécanique quantique était encore une doctrine sans application concrète. “J’étais passionné mais je n’étais pas un génie non plus. J’ai préféré bifurquer vers une école de commerce. Je me suis spécialisé dans les achats au feeling. C’est drôle parce que quand on y pense, je n’avais aucune culture industrielle, à l’époque !”, relate sobrement Philippe Tura. Il est recruté chez Sagem, chargé des achats électroniques : “C’était le boom des fax à papier thermique. Il s’en vendait 600 à 800 000 par an à l’époque. C’était le début de la mondialisation et des échanges avec l’Asie et les Etats-Unis. J’ai l’impression d’être un ancêtre en racontant ça”, rit-il de lui-même.
Stratège et leader dans l’âme
De 1994 à 2009, il poursuit sa carrière chez deux équipementiers automobiles. D’abord chez Valeo en Eure-et-Loir puis à Paris. Ensuite, chez Forvia où il est nommé directeur des achats, équipements et outillages et encadre une dizaine de personnes. En 2009, il est débauché par Sogefi, autre équipementier : “J’avais 43 ans et l’impression d’avoir fini un cycle. On me proposait de créer purement et simplement un département achats. De travailler sur un périmètre mondial, en encadrant 20 à 25 personnes. Je n’ai pas pu refuser.” Philippe se découvre alors un intérêt croissant pour la définition des organisations, la stratégie, le pilotage des transformations et leur impact humain : “La partie « technique » des achats est juste une boîte à outils qui peut se réadapter à l’infini. Mais savoir comment appréhender un contexte, à quel moment lancer telle ou telle action, c’est ce qui est le plus excitant. Et convaincre des équipes de changer leur process, leurs habitudes pour les faire gagner en performance alors qu’au départ, ils vous regardaient avec une moue dubitative, c’est ce qui m’intéresse profondément.”
En 2015, rebelote ! Philippe Tura est débauché par une entreprise des télécoms pour créer de nouveau une direction des achats. Mais l’entreprise est rachetée rapidement et le tout jeune quinquagénaire est remercié. S’ouvre alors pour Philippe, une période de questionnement, passage obligé et pas toujours évident pour un homme dont la carrière n’a connu aucun répit. “Du jour au lendemain, votre agenda ne s’impose plus à vous et vous éprouvez une sensation de vide.” La période n’est d’autant pas facile qu’en tant que senior, son profil d’expert suppose un investissement lourd pour les entreprises.
Rupture et nouveaux horizons
C’est à ce moment-là que Philippe commence à enseigner – un hobby qu’il n’a plus jamais lâché depuis – et qu’il se lance dans le management de transition. Un peu par hasard. Un cabinet lui propose une mission de management-relais de 6 mois pour un groupe de cosmétique qui de fil en aiguille se poursuit pendant 18 mois pour aboutir à une véritable mission de transformation. Du management de transition pur et dur. “J’ai enchaîné avec des missions dans les câbles, le béton, le vélo, les chaudières biomasse… En fait, je ne me suis jamais arrêté. Et aujourd’hui, je n’ai pas envie de revenir vers un emploi classique. Je suis à un âge où j’ai envie de liberté professionnelle”, affirme Philippe.
Pourquoi ? Peut-être parce que la stimulation intellectuelle de son activité est une source d’épanouissement. “C’est un métier où on vieillit moins parce qu’on n’a pas le choix.” Il faut toujours aller plus loin, se poser les bonnes questions et se remettre en question. D’ailleurs, depuis deux ans, Philippe Tura a intégré le collectif IMWI qui se penche sur le management de transition à impact positif. Notamment sur les questions sociétales, sociales et environnementales. “Aujourd’hui, les entreprises travaillent sur la « sustainability », à cause de la pression légale. Comment faire pour qu’elles s’impliquent davantage, qu’elles inscrivent « l’impact » dans leur ADN ? On peut aussi les amener à l’impact par d’autres voies : pour les achats, on peut par exemple proposer une approche autour de la sécurisation de la supply-chain en étant pragmatique. La guerre en Ukraine, la COVID et leurs conséquences ont bien montré les fragilités de certaines filières d’approvisionnement. D’où de nombreuses réflexions sur les relocalisations industrielles. Or, celles-ci pour être concurrentielles supposent une reconception des produits avec souvent une réduction de l’utilisation des matières, qui elles-mêmes aboutissent à une moindre consommation de carbone.” La démonstration est plus que séduisante, elle est convaincante. C’est parfois un déclencheur pour un projet d’achats responsables. De toute façon, en tant que société, avons-nous encore le choix ?