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Créer du lien fort avec ses talents externes : une nouvelle mission pour les RH ?

Un paradoxe moderne : autonomes mais engagés

Le mythe du freelance solitaire, distant, désengagé, ne tient plus. Selon le baromètre Freelance.com – Ipsos (2023), 68 % des indépendants déclarent souhaiter entretenir un lien “durable, de confiance et de réciprocité” avec leurs clients réguliers. À l’inverse, 42 % se disent frustrés par un manque de reconnaissance ou de visibilité dans les projets menés en entreprise.

Autrement dit : les freelances haut niveau recherchent une relation claire, respectueuse et ancrée. Sans attendre les attributs du salariat, ils souhaitent être considérés comme de véritables partenaires de mission. Côté entreprises, le besoin est symétrique : sécuriser la collaboration avec des experts rares, éviter la perte de savoir-faire à la fin d’une mission, fidéliser les meilleurs profils.

Ce double mouvement redéfinit les attentes de part et d’autre. Il fait émerger une mission nouvelle — et souvent négligée — pour les RH : créer et entretenir un lien fort avec les talents externes.

Pourquoi les RH sont encore peu impliquées

Traditionnellement, les freelances échappent au périmètre de la fonction RH. Ils relèvent des achats, du juridique, ou directement des opérationnels. Cette approche cloisonnée pose plusieurs limites :

· Aucune capitalisation sur les missions passées ;

· Absence de retour d’expérience ou d’évaluation standardisée ;

· Risque de déconnexion entre besoins métiers et vivier externe.

Selon une étude Deloitte (2023), 88 % des freelances en mission en entreprise n’ont jamais eu de contact avec le service RH. Pourtant, ces mêmes entreprises expriment des difficultés à fidéliser leurs meilleurs profils ou à structurer un vivier externe fiable.

Cette disjonction révèle un angle mort dans la gestion des talents. Les freelances sont des contributeurs clés mais non cartographiés, non suivis, non accompagnés.

Ce que les indépendants attendent d’une “bonne relation client”

Les attentes exprimées par les freelances sont claires. D’après une enquête Malt x Boston Consulting Group (2022), les trois leviers de satisfaction les plus cités sont :

1. La clarté du brief et des objectifs de mission (89 %).

2. La qualité de la communication avec l’équipe projet (76 %).

3. La reconnaissance de leur apport (non hiérarchique mais symbolique) (64 %).

Contrairement à une idée reçue, les freelances haut niveau n’attendent pas de « confort RH », mais un cadre de travail clair, fluide, humainement solide.

Ce lien peut se traduire par :

· Un onboarding rapide mais bien conçu (contexte, outils, interlocuteurs).

· Des échanges réguliers et non intrusifs.

· Un accès aux informations nécessaires pour être pertinent.

· Une visibilité sur la suite du projet (même si leur mission est courte).

Des entreprises pionnières montrent la voie

Certaines organisations ont commencé à structurer une “expérience freelance” à part entière. Par exemple :

· Crédit Agricole Assurances a mis en place un onboarding spécifique pour les indépendants (accès anticipé aux outils, présentation des enjeux business, binôme projet).

· Sanofi intègre les freelances dans certaines instances projet, sans lien hiérarchique mais avec un statut d’intervenant stratégique.

· Schneider Electric a développé un “répertoire expert” recensant les indépendants ayant bien performé sur mission, accessible aux managers.

Ces initiatives améliorent la fluidité opérationnelle, réduisent le turnover, et facilitent la montée en charge rapide.

Le rôle à jouer pour les RH

Pour passer d’une logique transactionnelle à une logique partenariale, les RH peuvent intervenir sur plusieurs leviers :

· Formalisation d’un référentiel de collaboration avec les freelances (règles, postures, attentes mutuelles).

· Création d’un vivier actif, avec une logique de suivi, d’évaluation et de réengagement.

· Formation des managers à la relation “non hiérarchique” mais exigeante avec des profils autonomes.

· Analyse des données de mission pour identifier les pratiques efficaces (temps de staffing, taux de satisfaction, fidélisation).

Ces démarches peuvent s’inspirer des logiques de “marque employeur” et les adapter à une “marque partenaire freelance”, fondée non sur l’engagement long terme, mais sur la qualité perçue, la transparence et l’efficacité.

Un investissement rentable

Les entreprises qui structurent ce lien obtiennent des résultats mesurables. Selon une étude menée par Open Assembly (2023), les organisations ayant un processus RH dédié aux freelances :

· réduisent de 28 % le temps moyen de staffing ;

· augmentent de 46 % le taux de reconduction des missions ;

· obtiennent un score de satisfaction freelance supérieur de 33 % à la moyenne du marché.

Créer du lien, ce n’est donc pas un supplément d’âme. C’est un levier stratégique, humain, et rentable.

Lilia AGZENAÏ, Talent Manager.