Olivier Morisson, droit au cœur
Après une carrière professionnelle entière dans le CAC 40, d’associé du cabinet Accenture à Directeur chez Axa, Olivier Morisson peut se targuer d’avoir une vision à 360 degrés du business, à la fois sur les volets opérationnels et financiers. Une expertise peu commune combinée à une efficacité redoutable.
Olivier Morisson n’est pas du genre à tourner autour du pot. Franc et direct. Chemise blanche sur pull-over bleu clair. Il se tient droit, vous regarde de ses yeux bleus perçants et vous parle sans détour. Il dit ce qu’il a à dire avec une économie de mots et un langage parfois fleuri, un brin provoc’ et juste ce qu’il faut d’humour pour contrebalancer le tout. L’ensemble est à la fois divertissant et un peu déstabilisant. Olivier en a conscience et ça l’amuse : “Les gens ne savent pas toujours sur quel pied danser avec moi. Je suis un pragmatique, j’aime l’ordre. Ce qui n’est pas indispensable, je ne m’en occupe pas. Je suis l’Allemagne au milieu des pays latins en quelque sorte.” C’est aussi à n’en pas douter une façon d’évaluer très vite ses interlocuteurs.
Il faut dire que le jeune sexagénaire n’est pas né de la dernière pluie. Au cours de sa carrière, il a travaillé en France comme à l’international, en cabinet de consulting comme dans des grandes entreprises, en free-lance ou comme membre de Codir. “Si vous voulez résumer mon parcours professionnel, c’est assez simple. C’est un triple A : Accenture, Axa, Air Liquide.” 16 ans à gravir les échelons en consulting, jusqu’à devenir associé. 10 ans aux directions Investissements-Comptabilité et Transformations digitales du groupe spécialisé dans l’assurance. L’accompagnement de la direction générale depuis plus de 2 ans dans un projet transversal de conduite du changement auprès du groupe industriel. Actuellement, il est aussi missionné par un grand groupe automobile pour encadrer une équipe de 25 consultants avec le but de construire de nouveaux référentiels prix pour l’ensemble de ses gammes. Une petite révolution à venir. Il est vrai que le profil d’Olivier à de quoi séduire. “Je ne m’en laisse pas compter. Je pense comprendre les exigences opérationnelles des clients et je sais ce dont est capable un cabinet de conseil ou un intégrateur.” Ce qu’il ne dit pas, c’est qu’il est aussi un bourreau de travail, qu’il a une vaste expérience du management et que son franc-parler a quelque chose de rassurant au fond.
Straight to the point
Cette assurance et cette philosophie “straight to the point” lui viennent à la fois de son éducation et de l’environnement dans lequel il évolue. Époux de la fille d’un général et lui-même fils d’un officier de marine, Olivier Morisson grandit à Toulon avant que son père ne rejoigne l’état-major en région parisienne. Il fait ses classes préparatoires au lycée Louis-le-Grand, avant de rejoindre l’école Centrale et de faire VSNE. Il effectue deux ans de recherche à l’université de Houston, au Texas. “J’ai vite compris que ce n’était pas pour moi. Je travaillais dans un laboratoire entouré de Chinois, d’Indiens, d’Américains. C’était la négation même du travail d’équipe car chacun travaillait sur SON sujet.” C’est pour cette raison qu’il rejoint le cabinet Arthur Andersen (futur Accenture) où il se penche au départ sur nombre de missions techniques. Pour Dassault, Renault-Nissan, Samsung… Il gravit les échelons, toujours poussé par l’envie d’aller plus loin, plus haut. Mais au milieu des années 2000, alors qu’il est au sommet de la hiérarchie, ce jeu auquel il est si bon ne l’amuse plus vraiment. “J’avais fait le tour. J’avais l’impression de m’ennuyer et de faire tout le temps la même chose.”
Olivier Morisson se tourne alors vers l’opérationnel. Autant mettre ses connaissances éclectiques face à un nouveau défi. Il passe quelques années à la direction informatique de Saint-Gobain, avant de rejoindre Axa. On lui demande d’harmoniser la compatibilité des investissements dans l’ensemble des pays où est implanté le groupe. En clair, créer un centre de décision à Paris et rassembler toutes les autres opérations de comptabilité en Inde. Un projet de plus de 100 millions d’euros qu’Olivier va mener d’une main de maître avec ses équipes. “Un boulot de dingue, complexe, mais passionnant. D’ailleurs, c’est assez révélateur, je me suis retrouvé à mettre en œuvre ce que je vendais quelques années plus tôt en tant que consultant. La boucle était bouclée.”
The cherry on the cake
En 2017, Olivier est recruté à la tête d’un programme de transformation, toujours chez Axa. La mission ? Digitaliser le parcours dépannage pour les accidents de voiture, en ayant recours à une application plutôt qu’à une centrale téléphonique. On lui confie le développement des grands comptes dans le secteur automobile, ce qui le ravit. L’opération va bon train jusqu’à ce que la Covid se joigne à la partie. L’ambition de cette initiative était de développer les nouvelles mobilités mais le projet ne décolle pas, victime du confinement. Plus personne ne sort de chez soi. Olivier et son employeur se séparent.
L’intéressé fait alors le tour du marché, enchaîne les pitchs et les entretiens mais au fond, le cœur n’y est pas. Il connaît sa valeur, ses compétences et sa force de travail. L’idée de répondre à une hiérarchie omniprésente et de faire du politiquement correct ne le séduit guère. Il décide de se mettre à son compte :
“Quand on arrive à se détacher du salariat, il n’y a plus d’angoisse métaphysique. Parce qu’au fond, à part la couverture sociale, quelle est la plus-value ? Pour moi, l’indépendance, c’est un bonus de fin de carrière et l’occasion d’assurer le financement des études de mes enfants. J’aime enchaîner les missions, avec des clients variés, notamment dans le secteur automobile. Comme en ce moment, où je travaille avec un constructeur japonais.” Une liberté retrouvée, droit au cœur.
par Déborah Coeffier